Cette fois ci, c'est le France Inter de Philippe Val et les animateurs de la « Rue des Entrepreneurs » qui viennent nous prendre à témoins d'une affaire à régler. La rue en guise de Justice. Et le voyeur d'actualité pris pour un ragondin.
Voici l'intégralité de l'article du Monde.fr du 29 mars 2010, paru dans l'édition papier du 30 mars.
« L’émission "Rue des entrepreneurs" menacée par la direction de France Inter.
Après vingt-huit ans d'antenne, l'émission "Rue des entrepreneurs" pourrait disparaître de la grille de France Inter. Depuis fin 2009, la direction de la radio est en conflit avec Didier Adès et Dominique Dambert, les deux animateurs du magazine hebdomadaire. Le 11 décembre, elle leur a adressé un avertissement pour "faute grave", leur reprochant d'avoir eu des démêlés avec leur assistante, ancienne déléguée syndicale CGC, battue aux élections professionnelles en novembre 2009.
Obligée de reprendre le chemin du travail après dix ans au service de son syndicat, cette nouvelle assistante n'aura pourtant guère eu le temps d'être harcelée. Quelques jours à peine après son arrivée fin novembre au service de la "Rue des entrepreneurs", la nouvelle a obtenu un premier arrêt maladie de quinze jours, suivi d'un second de même durée. C'est pendant son absence que Didier Adès et Dominique Dambert ont reçu, par lettre, un "avertissement disciplinaire" de la direction d'Inter.
Pour tenter de comprendre les origines de ces accusations de harcèlement express, les deux animateurs de l'émission ont "demandé un rendez-vous à Philippe Val", directeur de France Inter. Une demande restée aujourd'hui encore "sans réponse".
En revanche, Didier Adès et Dominique Dambert ont étéconvoqués "la semaine dernière à un entretien préalable au licenciement". "Notre avocat négocieavec la direction, explique au Monde Didier Adès. On nous a fixé un ultimatum jusqu'au 1er avril." A cette date, faute d'avoir accepté ses conditions, la direction de la radio se ditprête à aller au contentieux.
"Meurtris, trahis", Didier Adès et Dominique Dambert ne veulent pas céder. Par ce procédé"honteux", selon eux, la direction de France Inter voudrait en fait "se débarrasser de l'émission". Selon les deux animateurs, cette affaire à valeur de "test" : après "Rue des entrepreneurs", la direction pourrait s'en prendre à d'autres émissions.
Guy Dutheil Article paru dans l'édition du 30.03.10
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Nous entrons là dans l'univers merveilleux du pouvoir disciplinaire de l'employeur, qui est (encore) un peu encadré par la loi afin de protéger les salariés contre tout abus de pouvoir.
Rappel: Si l'employeur juge que son employé a mal exécuté son contrat de travail, et qu'il considère ce manquement fautif, il peut lui infliger une sanction, dont l'échelle des valeurs est prévue dans le règlement intérieur (à France Inter ce règlement est obligatoire) qui prévoit aussi les règles, mentionne les droits de la défense des salariés et les dispositions liées à la protection des victimes de harcèlement.
1°) le 12 ou le 13 décembre 2009, Les deux salariés auraient reçu «un avertissement pour faute grave». Ici, l'employeur ayant à décider d'une sanction proportionnelle aux faits fautifs a choisi «l'avertissement», qui est une faible sanction, mineure, qui s'apparente à une remontrance.
Or, dans ce qui nous est rapporté, il y a dualité entre le mot «avertissement» et celui de «faute grave» accolé ce qui ne peut exister puisque l'avertissement ne sanctionne rien de grave ! L'employeur qui donne un «avertissement» mais ne peut le qualifier, et à fortiori de "grave".
Est-ce la rédaction du billet du Monde qui rapporte mal ou est-ce la réalité?
2°) «Pour tenter de comprendre les origines de ces accusations de harcèlement express les deux animateurs de l'émission ont "demandé un rendez-vous à Philippe Val".
Cette phrase tend à faire croire que les deux salariés ont été sanctionnés sans qu'une explication ait été donnée par l'employeur. Si la loi ne prévoit pas d'entretien spécifique et obligatoire avant la notification de l'avertissement, l'absence de réunion explicative et contradictoire en tête à tête employeur/salarié augure mal de relations harmonieuses dans l'entreprise ! Sacré Philippe Val !
3°) l'article du Monde est mis en ligne le 29 mars 2010, parait dans l'édition le 30 mars. On y lit: Didier Adès et Dominique Dambert ont été convoqués "la semaine dernière à un entretien préalable au licenciement"...
On peut en conclure que la convocation a été reçue entre le 22 et le 28 mars, la date de réception de convocation marquant le début de la procédure pouvant conduire au licenciement. A partir de cette date, le principe d'une rupture est acté. Et donc, la procédure doit aller à son terme, jusqu'à réception de la décision écrite de l'employeur qui licencie ou pas. Jusqu'à ce moment, toute négociation est interdite qui aurait un lien avec cette forme de rupture de contrat de travail ! Nous ne sommes plus dans l'hypothèse d'une "rupture conventionnelle" ou d'une "transaction". L'employeur doit aller au bout de la logique de la procédure choisie.
Or,
4°) on peut lire: "Notre avocat négocie avec la direction, explique au Monde Didier Adès. On nous a fixé un ultimatum jusqu'au 1er avril.".
Il est extravagant de lire que les salariés Dambert et Adès, si "meurtris" et "trahis" aient autorisé leur avocat (qui s'est laissé faire!) à "négocier" pendant le déroulement de la procédure. Ils sont à la manœuvre et ne s'en cachent pas.
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Résumons: il est mis sur la place publique un différent disciplinaire entre deux parties alors qu'une procédure est en cours, laquelle est joyeusement foulée au pied... par les deux parties qui sont entrain de négocier en dehors de toute légalité.
En conséquence, le lecteur ordinaire peut en conclure que les deux parties ont un intérêt à médiatiser l'affaire.
Et qu'ainsi, après l'épisode "granguignolesque" du "faux vrai licenciement" de Zemmour par Le Figaro, le "vrai faux" licenciement de Didier Adès et Dominique Dambert par le France Inter de Philippe VAL, donne à voir un sinistre bras de fer avec "ultimatum", qui se moque des règles de la République.
Ici encore, - l'information étant réputée exacte - l'employeur se sert l'entretien préalable au licenciement comme outil de pression pour faire rendre gorge au salarié... afin de ne pas avoir les mains salies par un licenciement effectif sur lequel il aurait éventuellement à rendre des comptes. La guillotine au bout du chantage, ou le chèque substanciel qui fait taire.
Pour la seconde fois en quinze jours dans l'actualité. Formule gagnante, quoi.
Le Code du Travail en ôtage, ridiculisé, bafoué, supplétif et vaseline des dérives ordinaires. Avec le fric en régulateur du contrat de travail et la médiatisation en guise de plaidoierie. Les jeux du cirque.
"Honteux", disent -ils.
Oui, honteux.
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EXTRAIT:
Convention collective nationale de travail des journalistes (et avenant pour les entreprises de l’audiovisuel du secteur public) Règles à observer
Art. 44. - Les employeurs s’engagent, dans le cadre de la législation en vigueur, à respecter les règles suivantes de licenciement dans les cas particuliers ci-après :
a/ Suppression d’emploi. Dans ce cas le journaliste professionnel congédié et sans emploi sera réengagé en priorité dans le premier poste vacant de sa compétence.
b/ Faute grave ou fautes répétées dans le service et notamment : voies de fait, indélicatesse, violation des règles d’honneur professionnel. Dans ce cas, si l’intéressé a été congédié sans préavis ni indemnités, après que les règles prévues par la loi ont été respectées, il pourra se pourvoir devant la commission arbitrale prévue par l’article L. 761-5 du Code du travail (L. 7112-3 et L. 7112-4) ou toute autre juridiction compétente...
...
Additif à l’article 44 propre aux entreprises de l’audiovisuel du secteur public
44-1-1. - Licenciement économique : ...
44-2. - Licenciement pour autre motif : Lorsque le licenciement a un autre motif et qu’il ne sanctionne pas une faute grave, l’inspection du travail est consultée dans les conditions fixées à l’article L. 122-4 (L. 1231-1) et suivants du Code du travail et selon la procédure définie par les articles L. 122-14 (L. 1232-2)
Le délai d’un jour franc mentionné au 2e alinéa de l’article L. 122-14-1 (L. 1233-13) est porté à huit jours francs. Pendant ce délai, la commission paritaire prévue à l’article 18 est réunie à l’initiative de l’employeur. Elle émet obligatoirement un avis sur le licenciement envisagé.
Article 46 bis propre aux entreprises de l’audiovisuel du secteur public : discipline
46 bis-1. - Tout manquement aux obligations professionnelles constitue une faute pouvant entraîner une sanction.
Les sanctions applicables sont :
1/ L’avertissement
2/ Le blâme, avec inscription au dossier ;
3/ La mise à pied avec privation de la totalité du salaire pour une durée fixée au plus à trois jours ;
4/ La mise à pied, avec privation de tout ou partie du salaire pour une durée d’une semaine au moins et d’un mois au plus, sous réserve de la quotité insaisissable ;
5/ Le licenciement avec ou sans préavis, mais sans l’indemnité prévue à l’article 44-3.
46 bis-2. - Pour toute sanction autre que l’avertissement ou le blâme, l’avis de la commission de discipline est obligatoirement requis. Néanmoins le journaliste, qui a fait l’objet d’un avertissement ou d’un blâme avec inscription au dossier peut demander que le dossier soit porté devant la commission de discipline.
46 bis-3. - Dans les cas graves et qui exigent, sans délai, une solution provisoire à caractère conservatoire, l’employeur, par décision spécifique, peut, jusqu’à la décision définitive, suspendre le journaliste de son service.
L’employeur doit saisir commission de discipline dans les huit jours de la décision de suspension.
46 bis-4. - Lorsque les faits donnant lieu à comparution devant la commission font l’objet de poursuites pénales, la commission de discipline peut surseoir à statuer jusqu’à ce que la décision rendue par la juridiction saisie soit devenue définitive.
Les condamnations à une peine afflictive et infamante telle qu’elle est définie aux articles 7 et 8 du Code pénal peuvent donner lieu d’une comparution devant la commission de discipline.
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