lundi 25 octobre 2010

> Valeurs républicaines.


Vous êtes sûr, vous, que votre organisation syndicale développe des « valeurs républicaines »?

Outil conçu pour démolir doucement le syndicalisme, la  loi (n°2008-789) du 20 août 2008 (pourtant signée par la CGT et la CFDTfixe les nouvelles règles de détermination des organisations syndicales.
Pour pouvoir prétendre entrer dans l'entreprise, s'y implanter et participer à la vie sociale, le premier critère auquel elles doivent satisfaire est le « respect des valeurs républicaines »(article L. 2142-1 du Code du Travail).


Lors d'une réunion, le point 1-6 de la « position commune du 9 avril 2008 » en avait donné une définition: «  le respect de la liberté d’opinion, politique, philosophique ou religieuse ainsi que le refus de toute discrimination, de tout intégrisme et de toute intolérance ».
Lisez-bien la loi: le législateur a pris soin de ne pas reprendre la définition de l'accord ou de définir lui-même ce que sont « les valeurs républicaines », comme s'il déléguait au seul employeur le soin de les définir!


L'affaire n'a pas traîné: c'est par ce sas que le patronat s'engouffre dans la brèche et instrumentalise. Vous ne voulez pas de présence syndicale dans votre entreprise? Demandez à la justice de dire que telle organisation ne porte pas de « valeurs républicaines » ! Par la petite porte du nouveau quinquennat, dès 2008, le recul des droits des salariés, des droits syndicaux et de la démocratie montrait le bon de son nez.

La pratique est très mode: comme la loi l'invite à décider des « valeurs républicaines », l'employeur se croit autorisé à filtrer qui peut syndicalement penser et dire. Enfin ! il la tient cette possibilité de pointer du doigt ce corps intermédiaire qu'est le syndicalisme, fauteur de troubles et empêcheur debien commun que seul le capitalisme procure pour l'intérêt général...!
Le vers est dans le fruit: là encore (déjà), dans cette législature 2007/2012, c'est la liberté d'opinion qui est en jeu.

Ainsi, SFR a attaqué Sud, au prétexte que ses statuts évoquent « le socialisme-autogestionnaire », que la transformation sociale dans la perspective du socialisme autogestionnaire" est contraire au respect des valeurs républicaines » ce qui à ses yeux s'oppose au droit de propriété et à la liberté d’entreprendre qui sont aussi dans la République...


Et puis, c'est la CNT qui était attaquée le 22 octobre 2009 par le Sté Baud qui demandait une annulation d'un représentant de section syndicale affiliée à la CNT... à cause des statuts de la CNT.

Par jugement du 11 février 2010, le tribunal d'instance de Boissy St léger déboutait la Sté Baud et disait que « le fait pour un syndicat, aux termes de ses statuts, d’avoir pour objet de former et d’organiser les travailleurs pour l’abolition de l’État ou de préconiser l’action directe, c’est-à-dire une forme de lutte décidée, mise en œuvre et gérée directement par les personnes concernées, n’est nullement contraire aux valeurs de la République. Ces objectifs et moyens participent au contraire de l’action revendicative propre à l’action syndicale ». Et toc !

Avec un clin d'oeil à la Charte d'Amiens qui « assigne au syndicalisme un double objectif et une exigence : la défense des revendications immédiates et quotidiennes et la lutte pour une transformation d’ensemble de la société en toute indépendance des partis politiques et de l’Etat ».

Tranquillement, la Cour de Cassation vient de confirmer la décision du Tribunal d'instance de Boissy Saint Léger, dans un arrêt du 13 octobre 2010 (PDF joint).

Comme quoi la révolution et la République iraient de pair pour la Justice...

La CGT l'aura échappé belle, qui « prône la fin de « l’exploitation capitaliste », comme FO qui se prononce pour la disparition du « salariat et du patronat » ou même comme la CFDT qui « combat toutes les formes de capitalisme » Enfin, s'ils n'ont pas changé...

Comme prochaine étape, si le coup des « valeurs républicaines » prospérait, passant des syndicats aux partis politiques, on passerait à qui, dans l'interdiction de l'expression?

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Fichier attachéTaille
arret_n_10_60130_Cour_de_Cassation_13_octobre_2010_Baud_contre_CNT.pdf53.09 Ko

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