mercredi 6 octobre 2010

> Pourquoi j'ai remboursé la dette à Kerviel



« allo Rapha ? C'est Olivier ! T'as entendu le verdict contre Kerviel ? ». C'était M° Metzner, tout essoufflé, qui venait s'épancher, tant il avait l'impression qu'on avait pris en première instance sa plaidoirie pour un épisode de bibi fricotin. « Tu ne peux rien faire ? », qu'il me dit.



Il est marrant, Olivier. « Comme ça ? De but en blanc ? » j'ai répondu. « Je te tél. ce soir ».

J'étais les mains dans la lasure incolore de la cabane de jardin de ma sœur au moment de l'appel téléphonique. J'écoutais France Info, comme d'habitude; oui, France Info, cette radio qui donne la même info en boucle du matin au soir.




Je connais bien l'avocat. Je l'avais connu dans un Conseil de Prud'hommes du temps où il débutait et qu'il ne défendait que des employeurs pour se faire de la pub (et accessoirement payer ses impôts). Nous étions restés en bons termes. Lui et moi sommes gourmands comme des chats jaunes. Ça rapproche. On se rencontrait souvent à Levallois-Perret, à cause du maire.

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On dira ce qu'on voudra, mais le jugement étant ce qu'il est, ce qu'il en ressort, c'est que la Société Générale est l'employeur d'une bande de bras cassés à la Direction où pullulent des bac+15: ils sont tellement compétents qu'ils n'ont rien vu ni rien entendu. « C'est pas moi, m'siou, c'est Kerviel, qui est un gros méchant ». Il est fort ce Jérôme. A lui tout seul, il fait office de constat d'évaluation.



Concernant le remboursement du manque à gagner pour la banque, je suis d'accord: ce n'est que justice que Kerviel soit condamné à rembourser le pognon à la Société Générale, parce que cette masse d'argent, la Société Générale avait décidé de la donner en totalité à l'État pour réduire le déficit des régimes de retraites ! Du joli mécénat. Ça tombait mal, cette fuite, non ?


Mais on avait pourtant là une belle occasion de décortiquer le système bancaire et ses monstruosités pour les citoyens. Rien ne s'est produit. On se croirait à Nanterre, la patrie du non-lieu. Juste le constat que Kerviel devrait rembourser la totalité des euros boursicotés et être envoyé au bagne de Cayenne, pendant cinq ans. Le morale était sauve.

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Évidemment que l'affaire va faire grand bruit. Chacun ira de son couplet. Il n'y a qu'à regarder sur Médiapart. Je ne vais pas en rajouter ! Juste un peu.



Je vous raconte brièvement ce que j'ai fait, avec mes mots usuels. Ce soir, je ne vais pas m'amuser à faire des sujets/verbe/complément et des imparfaits du subjonctif, et, beau ténébreux, faire semblant comme d'habitude de bien connaître mes sujets.

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J'ai d'abord téléphoné à Bertrand. Bertrand Delanoé, je veux dire.

C'est un gars démerde et sympathique. Il aime bien que je lui donne du Monsieur le Président, que je le flatte. Si vous le croisez un jour avant les primaires 2012 du PS, dites-lui qu'il a l'envergure d'un homme d'État, et vous aurez droit à un tour gratuit au manège de la Foire du Trône, avec la queue du mickey assurée.

Bertrand, homme de bien, aime bien ce qui est juste. Il est bon. Il sait ne pas aller trop loin avec la méchanceté. Il sait passer des compromis et participer à la paix des braves.

Je croyais frapper à la bonne porte:

« Tu ne pourrais pas voir Jacques Chirac et l'UMP pour que ça s'arrange, l'affaire Société Générale contre Kerviel » ? je lui demande. Je savais que Chirac et l'UMP avaient trouvé le trésor des templiers dans l’île d'Arros.

Il m'a dit aussitôt qu'il ne pouvait pas donner en ce moment, qu'il fallait qu'il refasse Paris-Plage l'année prochaine.

Quand il me rappela, il m'indiqua que Jacques Chirac n'avait plus que ses retraites des vieux cumulées pour survivre, et que l'UMP gardait ce qui lui restait de sous (attention, du légal !) pour les retraites-chapeau des députés de la majorité qui allaient en prendre une sévère pâtée.

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En définitive, tout le monde se défilait.

Alors, une main sur le cœur et l'autre au porte monnaie, je dus me résoudre à préparer le chèque.

Quand j'indiquai au Crédit Mutuel que je passerai demain pour une certification, l'employé me dit que je « n'étais pas sérieux », que mon « autorisation de découvert de 500 euros sera dépassée ». C'était un détail.

Il fallait bien se dévouer et tout arrêter. Sinon, la grève générale contre la réforme des retraites, on n'en entendrait plus parler.

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Ne vous étonnez pas si vous lisez dans la presse que « La Société Générale ne réclamera pas à Kerviel les 5 milliards d'euros ». La vérité ne sera pas dite.

Mais vous, vous saurez pourquoi. Le jugement de Cour d'Appel tiendra compte de l'arrangement, et tout sera bien dans la France contemporaine de la Ve République.

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D'où je sors ce fric ? J'ai fait fortune dans la bande dessinée.

Si vous avez besoin de quelque chose, un petit rien, faites-moi donc un mot par message particulier.



L'actualité est contemporaine, mais il faut savoir gérer son argent et savoir donner. La dialectique pour toutes les bourses.

Merci, la Société Générale.

Et merci qui, Jérôme ?

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