Ceux qui ne prennent pas la présidente du Medef au sérieux ne le sont pas.
Je ne suis pas de ceux là.
Elle a quelque chose de troublant qui m'attache à ses pas.
Et à ses mots.
Je suis rarement déçu.
Je me tourne souvent vers elle, pour trouver le chemin. Dans ce sens là, elle me regarde. Comme ses prises de positions, qui me regardent aussi. Il n'y a quasiment jamais rien de caché. Pour savoir quand et où je dois aller, il me suffit de regarder la direction qu'elle indique du doigt. Alors, je prends le sens inverse. Elle est ma pancarte et ma Rolex. Tout à l'heure, en fin de billet, ce sera je t'aime moi non plus.
Mais laissons nous aller au spleen. A sa PME Attitude. Même si son téléphone est coupé.
Mais laissons nous aller au spleen. A sa PME Attitude. Même si son téléphone est coupé.
D'aucuns disent qu'elle manie la langue de bois. Après avoir affirmé que "la liberté de penser commence là où s'arrête le Code du travail " ? Pourtant, toute sa vision de l'entreprise et de la société est contenue dans cette phrase !
D'autres disent qu'elle a ses petites pudeurs (UIMM). La vérité nue impose un rectificatif : ce n'est pas toujours. Il faut voir au coup par coup. Vérifier son programme et comparer avec les faits. Ainsi, si vous voulez savoir où elle en est, où en est le gouvernement Sarkozy (pardon à François Fillon) dans ses réformes, il faut convoquer les propos de la dame en regardant par-dessus ses épaules.
Ecoutons Laurence. Tout le monde constatera que ce qu'elle veut, elle l'obtient. Le diable est dans le détail, et le voici, qui tient bien sa place dans son tout premier discours Medef, intitulé "Vive l’entreprise au coeur de la société française"
C'était le 5 juillet 2005. Elle venait d'être élue. Après qu'elle eut remercié Ernest-Antoine Seillière du Château d'Ognon sans qui « rien n'aurait été possible », « Charles Beigbeder (demandeur infatigable de la réduction des charges, de l'assouplissement des licenciements, de la réforme d'un Code du Travail qu'il trouvait beaucoup trop rigide et de la suppression de l'Impôt sur la Fortune) « pour les idées nouvelles et stimulantes qu'il ne cesse d'apporter », Francis Mer ancien ministre des Finances de gouvernements Raffarin en 2002/2004, et Guillaume Georges Didier Sarközy de Nagy-Bocsa, le frère de l'autre, qui est passé depuis du textile à l'assurance santé privée, allez savoir pourquoi (sauf à faire un vilain rapprochement avec la sécu qui bat de l'aile...), elle exposa brièvement ce que serait l'avenir.
Ainsi, ce 5 juillet 2005, Laurence Parisot dit à son auditoire qu'avoir « ... une politique économique favorable aux entreprises, ce n'est pas être anti-social, c'est la condition même du social », que « ... la compétitivité de nos entreprises dépend en premier lieu d'une remise à plat de notre fiscalité », qu'elle ferait lancer « ... un reformatage de l'Etat, plus mince », que l'envie d'embaucher « ... est limitée par un droit du travail trop inadapté », qu'à ce propos, nous « ...prendrons des initiatives pour permettre l'émergence d'un droit du travail modernisé », que des réformes dans l'enseignement entraîneront un « rapprochement entre entreprises, universités, et recherche publique ...nécessaire », qu'il faut « ... poser sans tabou la question de la représentativité des acteurs sociaux ».
Fin 2009, le programme dont rêvait Laurence Parisot, Nicolas Sarkozy l'a fait. A la mitrailleuse lourde.
Laurence Parisot, ce même jour de 2005, eut aussi cette phrase, la main sur le cœur: il ne fallait « ... pas aggraver le chômage, dont le taux est le déshonneur de la France... ». Ça lui avait échappé. Depuis, le déshonneur abreuve plus encore nos sillons.
Et puis, les poings serrés sur le pupitre, elle lança sa série des « Non à ... » (à l'agressivité, aux fausses alternatives, à la dérision).
Aujourd'hui, arrêtons-nous à ce dernier « Non à » : « Nous entrepreneurs, nous disons non à la dérision qui parcourt beaucoup trop de discours et d'interventions publiques. Cessons de croire que la raillerie et le sarcasme sont des manifestations de l'intelligence. La dérision, c'est bien souvent vouloir détruire pour détruire. Quand la dérision franchit la ligne jaune, elle n'est plus un signe de démocratie mais une menace pour la démocratie. Elle devient le visage politiquement correct d'une violence contre les valeurs les plus fondamentales de la République.
A la dérision et son esprit de destruction, nous préférons la sincérité et son esprit de construction. La sincérité sans naïveté bien sûr. ».
A la dérision et son esprit de destruction, nous préférons la sincérité et son esprit de construction. La sincérité sans naïveté bien sûr. ».
En 2005, Laurence Parisot ne supportait pas la dérision. Cela devait sûrement se rapporter à quelque chose ou quelqu'un. Nous le saurons un jour.
Mais justement, dans l'actualité de décembre 2009, l'attitude du MEDEF expose son flanc aux dériseurs.
Tout le monde connait le problème : dans les entreprises de moins de 10 salariés, (très grande majorité des PME et des TPE), les interlocuteurs manquent face aux dirigeants. La loi d'août 2008 sur la modernisation du dialogue social, initiée par le Medef, a inscrit cette réalité dans le marbre et au calendrier la question de la représentativité dans les TPE, qui aurait déjà dû voir se dérouler des négociations abouties par consensus depuis le 30 juin entre les « partenaires sociaux ».
Mais rien ne s'est passé. Le Medef est contre toute négociation ! Il n'y a personne au bout de l'écouteur, quand les syndicats ouvriers et l'UPA répondent et travaillent de concert.
Pour justifier l'attitude de son organisation Laurence Parisot a déclaré le 20 décembre 2009 que dans le million de très petites entreprises de moins de onze salariés, « le dialogue existe déjà en permanence », et qu'en conséquence, « ... une obligation de dialogue social dans les TPE reviendrait à créer un problème là où il n'y en a pas. » . Vous avez bien lu...
Pourtant, un inspecteur du Travail, Gérard Filoche, écrit que:
« ...C'est là qu'il y a le plus turn over, le plus de temps partiel, les plus longues durées du travail, les salaires les plus bas, les conventions collectives les plus faibles, le plus fort taux d'accidents du travail et de maladies professionnelles, la flexibilité et la précarité les plus développées, le travail dissimulé le plus fréquent, le nombre d'heures supplémentaires impayées le plus élevée, le moins de droit, pas de syndicat et pas d'institutions représentatives du personnel... »
« ...C'est là qu'il y a le plus turn over, le plus de temps partiel, les plus longues durées du travail, les salaires les plus bas, les conventions collectives les plus faibles, le plus fort taux d'accidents du travail et de maladies professionnelles, la flexibilité et la précarité les plus développées, le travail dissimulé le plus fréquent, le nombre d'heures supplémentaires impayées le plus élevée, le moins de droit, pas de syndicat et pas d'institutions représentatives du personnel... »
Ce n'est pas non plus l'examen des demandes formulées devant les Conseils de Prud'hommes qui viendrait corroborer la version idyllique de Laurence Parisot. Tout le contraire.
Et Laurence Parisot d'enfoncer le clou à propos d'une amélioration du "dialogue" dans la petite entreprise : « ...Personne ne le réclame : ni les patrons, ni les salariés. ».
C'est que Madame Parisot à dû lire le sondage de OpinionWay / FIDUCIAL qui indique qu'à « ...une écrasante majorité, salariés et patrons de TPE rejettent les institutions représentatives du personnel ». OpinionWay (utilisé par Le Figaro, JDD, LCI, Metro), ça ne vous rappelle rien ? Souvenez-vous, c'était en juillet 2009, il y avait une info qui en parlait à propos de sondages commandités par l'Elysée.
> Quand il s'agit de casser du code du travail le MEDEF dit "présent".
> Quand il s'agit de mettre sur la table la démolition des Conseils de Prud'hommes à l'horizon de 2013 avec l'ami Darcos, le MEDEF dit « dépêchons nous d'y travailler ».
> Mais quand il entrevoit ce qui pourrait être le début d'une organisation sociale dans les TPE où travaillent un quart des salariés en France, le MEDEF dit non.
Avec la tête et le cœur à Laurence. Et ce malgré Darcos qui lui fait les gros yeux et menace : « attention, je vais prendre la chose en main si les partenaires sociaux ne s'entendent pas. ».
Mais qui sera dupe de la répartition des tâches, sur ce coup-ci encore ? Certaine de ce qu'il va advenir, Mme Parisot a décidé de ne pas négocier sur ce sujet. Parce que son organisation a intérêt à ne pas le faire. Stratégiquement. Pour fédérer les « durs ». Alors, elle impose le silence radio.
Elle préfère, en 2010, s'attaquer à « ... l'invraisemblable parcours d'obstacles que les entrepreneurs ont en permanence à franchir. Pour les réduire au minimum, il faut faire, pardonnez-moi le mot, une revue des emm... quotidiens infligés aux entreprises. »
En définitive, la priorité de Mme Parisot n'est pas la démocratie sociale. Une vie sociale d'entreprise à deux vitesses suivant que l'entreprise est grosse ou petite, voilà qui l'indiffère.
D'ailleurs, pourquoi le MEDEF, qui se moque comme d'une guigne des PME et TPE depuis toujours, aurait-il soudain la grâce révélée et la fibre partageuse ? La vérité est ailleurs : le MEDEF veut aussi contrôler les petits patrons, parce que les temps changent pour tous, que le MEDEF n'est plus représentatif, et que dans le patronat des recompositions sont aussi à l'œuvre, car on ne sait plus qui représente qui. L'épisode récent de la défection de l'Association nationale des industries alimentaires (Ania) en est le dernier avatar.
Le seul souci de Madame Parisot est de ne pas choquer dans son camp, de masquer les divisions internes au Medef et de ne pas alerter les petits patrons sur des positions que le MEDEF aurait à prendre ...au moment où elle compte se succéder à elle-même au Medef en 2010.
« La sincérité sans naïveté bien sûr !», disait-elle, en 2005. Il n'y aurait bien ni l'un ni l'autre. Il n'y a plus d'abonné au numéro que vous avez demandé. Rien que de la dérision.
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