N'y allons pas par quatre chemins: vous n'auriez pas un peu raté votre vie rêvée? Dès tout petit, autant qu'il vous souvienne, n'étiez vous pas persuadé(e) que vous vouliez faire toute votre scolarité chez les jésuites, dans le 16e arrondissement de Paris ? Même si vous ne saviez pas dire pourquoi.
Car vous aviez un pressentiment, celui de mériter cette "dimension élitiste, qui formerait un esprit de synthèse et vous fournirait des acquis qui vous serviraient dans votre vie". Vos parents n'y tenaient pas trop?
Pourtant, vous étiez fou accroc à cette idée que vous useriez vos culottes courtes au « Petit Externat du Trocadéro » qui avait été fondé par des jésuites en 1894. Sans nul doute aviez-vous déjà un côté mystique et un large sourire. Pourquoi cette fixation ? Allez savoir! Peut-être le spectacle d'un enterrement à la télé, commenté par Léon Zitrone qui avait dû en rajouter sur la biographie de quelqu'un de mort bien que très pieux.
Toujours est-il que ce petit externat est devenu grand: "de la maternelle aux classes préparatoire, Saint-Louis de Gonzague accueille aujourd'hui 1.800 enfants et jeunes". Aujourd'hui encore, "la tradition jésuite imprègne la pédagogie " dispensée dans cet établissement. Le lycée Saint-Louis de Gonzague accueille les bacheliers dans ses classes préparatoires économiques et commerciales (option économique) depuis 1985.
Vous rêviez d'être un de ces élèves élus qui envisagent « leurs études et leur formation professionnelle à la lumière de l'Évangile, selon la tradition pédagogique de la Compagnie de Jésus, dans le respect de la liberté de conscience de chacun... pour un niveau d'excellence » pour des cours auxquels il faudrait « ...ajouter une heure obligatoire de Formation Humaine et Spirituelle. ».
Vous étiez de « santé robuste et doté d'un bon équilibre ». Bien dans le cœur de cible, comme on dit maintenant. Aujourd'hui, ça n'aurait coûté à vos parents smicards que 1800 euros par an.
Vous avez donc effectué votre scolarité chez les jésuites. Vous en aviez bien le droit, il y en a d'autres.
En fait, vous êtes notre modèle du jour. Notre héros.
A l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, la soif d'absolu et de justice de notre héros le lance dans le syndicalisme étudiant pur et dur: ce sera l'AGED. Vous ne connaissez pas? Moi non plus.
Notre héros obtint une maîtrise de sciences de gestion en 1987 puis un DESS de marketing en 1988. Voilà qui prédestinait à une brillante carrière dans le commerce.
Sans qu'il y ait de rapport avec le fait que son papa soit amiral de la Marine, notre héros effectuera son service militaire en tant qu’élève-officier de réserve... dans la Marine Nationale, comme aide de camp de l’amiral commandant les forces sous marines et la force océanique stratégique, (FOST). Rien de troublant: un aide de camp est un officier, généralement dépourvu d’expérience, chargé de suivre un officier plus ancien pour faire exécuter ses ordres. En permanence à ses côtés, il bénéficie de son expérience, et veille à son confort. C'est important de veiller au confort de son chef. On en reparlera plus loin.
La FOST, basée à Brest, est la composante principale de la force nucléaire stratégique, l'outil de dissuasion dont l'ordre d'engagement des frappes par les sous marins nucléaires ne peut être donné directement que par le Président de la République. A ce niveau de l'exposé, la présence du Président est prémonitoire.
Attiré par la beauté, notre héros travaillera dans le groupe l'Oréal. A cause de Claudia Schiffer qui « entretient l'ovale de son visage grâce au Remodeleur Collagène de L'Oréal » ? L'histoire ne le dit pas.
« Chef de produit puis Chef de groupe marketing (1990-95), Responsable du recrutement (1995-2000) », il devient Directeur des ressources humaines (2000-2002). Dès lors, il va pouvoir exercer ses talents de gestionnaire d'effectifs.
Un jour, pris par le démon de la politique, il se demande un mi-temps qu'il va s'octroyer, en accord avec lui-même.
Il est maintenant sur Facebook, et de plus, il est ministre de l'Education nationale depuis le 23 juin 2009.
On attendait «un spécialiste de l'éducation et ce fut un politique... (qui avait su) se mettre dans les petits papiers de Nicolas Sarkozy ». Aide de camp, en quelque sorte...
Son côté officier de réserve ressortira encore en juillet 2009, deux mois après sa nomination: Luc Chatel serait le père fouettard, « inflexible avec les enseignants «désobéisseurs ».
Son côté commercial malin ressurgira le 17 août 2009, où venu dans un supermarché du Val-de-Marne vanter le blocage des prix des fournitures scolaires, il y aurait croisé des «clientes» étonnamment complaisantes. Ce dont rigola bien la presse étrangère. C'était le marketing au service de la politique, comme en 2003, « lors d’une opération prévention organisée par la Ligue contre la violence routière, des intermittents avaient été embauchés pour assister au discours de Nicolas Sarkozy ».
Son côté études secondaires sérieuses montre le bout de son nez en septembre 2009, au début de « son année scolaire. En effet, celui-ci a fait distribuer aux journalistes un dossier de presse consacré à la rentrée scolaire truffé de fautes d'orthographe. Tout y passe : accords oubliés, conjugaison piétinée, erreurs de syntaxe... ». Nous avons tous prié pour lui à l'époque, même si nous savions faire aussi des fautes.
Le côté syndicaliste combatif et pugnace de Luc Chatel, resté intact, on l'éprouvera encore le 27 mai 2010 lorsqu'il assurera sur RMC qu'il « refuse de baisser son salaire ». Regardez la vidéo.
Et puis, Luc Chatel, qui n'a donc jamais mis les pieds dans une école publique pour sa scolarité va engager le processus vital de l'enseignement publique républicain en sabrant dans les effectifs et augmenter le nombre d'élèves par classe.
Pour faire une comparaison osée, c'est comme si Michel Onfray se mêlait de la cueillette des olives en Basse Provence qui aurait faite par Freud. Pourquoi tant de peine ?
A Brest, la statue est toujours à la même place. Au pavillon de la Lanterne, celle du commandeur aussi.
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le blog de Luc Chatel
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