Une « position commune sur la représentativité syndicale » avait été signée par la CGT, la CFDT, le Medef et la CGPME (1) qui avait permis de faire adopter une loi en 2008 sur la représentativité syndicale.
C'était pour la CGT et le CFDT la bonne affaire: monopoliser à elles deux la représentation des salariés, par le biais de nouvelles règles du jeu écrasant les « petits » et rappelant les joyeusetés du fait majoritaire en l'honneur dans les élections de la Ve République. Nicolas Sarkozy à la manœuvre de division. Et Bernard Thibault et François Chérèque, rigolards.
Une autre petite sucette avait été donnée en échange: la promesse d'engagement d'un embryon de représentation syndicale dans les très petites entreprises, prévoyant des élections dans celles de moins de 11 salariés. Une série de réunions s'étaient tenues sur le projet, duquel le Medef s'était vite retiré. De l'eau du bain sortira quand même un bébé, transmis au gouvernement.
Et voilà qu'un projet de loi complétant la loi n°2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail a été présenté en Conseil des ministres le 12 mai 2010 par le ministre du travail Woerth. Ce projet de loi ayant pour objectif de « moderniser » la représentativité syndicale des très petites entreprises (où elle n'a jamais existé !) notamment par la création de commissions paritaires régionales chargées d'aider les TPE à développer leur dialogue social.
En juin 2010, soudain, branle-bas de combat: par hasard, l'UMP s'inquiète pour les petits patrons !
C'est la vieille technique qui est appliquée là: le gouvernement fait une promesse, laisse passer du temps, fait intervenir l'UMP et le Medef, le Sénat filtre et ses députés achèvent la bête. Et le gouvernement ne tient pas la promesse. Sans l'avoir voulu, bien entendu !
Ainsi, les députés UMP s'opposent à la création de commissions paritaires territoriales dans les TPE.
Pourquoi ? Parce que ce serait faire entrer la révolution dans les TPE, alors que l'harmonie y règne !
« Cela pourrait donner le sentiment qu'est introduite, de manière indirecte, une présence syndicale dans les toutes petites entreprises au-delà de ce qui existe aujourd'hui ", a déclaré M. Copé à l'issue de la réunion, à huis clos, du groupe UMP à l'Assemblée ». La révolution, quoi.
« La représentation syndicale, c'est un marqueur politique. Nous, la majorité, on ne se voit pas favoriser les syndicats dans les TPE ", a résumé Louis Giscard d'Estaing, gardien du temple, député et ancien de LVMH et Lagardère, où l'on ne plaisante pas avec ces sujets là.
On l'aura compris, ceux-là sont les « marqués » du Medef et de la CGPME, qui ne veulent pas de dialogue social dans les entreprises, et qui en rajoutent:
> « Ce n'est pas le moment d'ajouter des contraintes nouvelles dans les très petites entreprises », proteste Laurence Parisot.
> « C’est une machine qui va mettre un peu plus d’administratif là où il n’y en a pas besoin, de qui se moque-t-on ? » dit Jean-François Roubaud, président national de la CGPME.
"Si ce texte est adopté en l'état, la relation directe entre le patron de TPE et ses salariés volera en éclats", ajoute t-il en menaçant le gouvernement. "Il s'agit d'un casus belli pour des centaines de milliers de patrons de TPE. Ils sont sans doute moins dans la rue que nos amis des syndicats, mais ils votent !". Le Président doit trembler de peur...
Le scénario est bien rôdé.
Déjà, le 27 mai, le Sénat, à limité « la portée du texte. ».
Le Ier juin, les députés UMP se sont opposés à la partie « dialogue social » du projet.
Puis François Fillon ayant fait semblant d'être ferme, il pourra dire bientôt qu'il a dû « céder » devant les difficultés. Qu'il ne veut pas jeter de l'huile sur le feu.
Bref, quatre millions de salariés des TPE vont continuer d'échapper à la démocratie dans l'entreprise, à la notion d'égalité dans la République.
C'était l'histoire de deux escargots qui vont à l'enterrement d'une feuille morte et d'un bébé jeté avec l'eau du bain.
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(1) refus de la CFE-CGC, de la CFTC et FO côté salariés et de l'UPA côté patronat.
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