mercredi 28 janvier 2009

> Nadine, vraie rousse et faux licenciement.


C'est l'histoire de Nadine.
Elle est obligatoirement importante, puisque c'est son histoire.
Un moment fort particulier de sa vie professionnelle.

Contrat de travail signé, Nadine s'agitait dans cet établissement chic depuis trois ans. Sans heurts. Sans que jamais une remarque désobligeante ne soit venue ternir l'idée qu'elle se faisait de sa mission et du rôle essentiel qu'elle tenait dans une entreprise qu'elle voyait florissante.
Son employeur, franchisé, ne disconvenait pas de sa bonne fortune d'avoir croisé sur le chemin un élément aussi redoutablement efficace. Ne disait-il pas à qui voulait l'entendre que Nadine était classée "meilleure commerciale de la marque dans la Région", et qu'il se félicitait qu'elle évolue dans son sérail?
L'employeur, bonhomme, aimait bien Nadine. Paternaliste en diable, d'un humour plaisant mais néanmoins curieux, il lui demandait élégamment si elle était bien "...une vraie rousse". Joueur et enjoué, il imposait parfois, furtivement, vite fait bien fait en passant, une affectueuse pression de "remontée de pouce", de haut en bas sur la colonne vertébrale d'une salariée prisonnière du casque téléphonique et d'un démarchage clientèle. A des moments d'égarement extrême ou de tendresse folle dont lui seul connaissait la cause, il la nommait gracieusement "Foufoune" L'homme était stylé, donc.


Allez savoir pourquoi une employée se tait. On lui dit bien qu'il faut se calmer, à l'employeur. Mais comme on plaque un sourire sur la prière, seul le sourire, même crispé, est retenu. C'est précieux, un CDI par les temps qui courent, doit-on se dire. Ils courent, les temps, mais moins vite que l'étonnement et la pérennité d'un contrat.


Un soir, après une journée de labeur égale aux précédentes, Nadine, rentrée chez elle, découvrit dans son courrier un récépissé de lettre recommandée: son employeur la convoquait à un entretien préalable à licenciement pouvant aller jusqu'à être qualifié de "grave". Pour faire bonne mesure, il invitait Nadine à rester chez elle, lui imposant une "mise à pied conservatoire", mesure d'écartement physique jusqu'à la fin de la procédure. Le lecteur avisé sait que dès lors, Nadine ne sera plus payée.


Le désarroi de Nadine fut grand. Une faute ? Mais laquelle ? "Grave", de surcroît ! Mais il n'y eut jamais un mot échangé avec son employeur, rien au sujet du moindre manquement ! Pas de reproche. Jamais. Et puis, pourquoi cette humiliation procédurale supplémentaire, qui me force à rester chez moi, parce que l'employeur estime que ma présence peut s'avérer dangereuse ou pas souhaitable dans l'entreprise?
Bien que mécontente d'avoir été convoquée à une heure de la journée où elle ne travaillait habituellement pas, Nadine se présenta. Mais son facétieux et imprévisible employeur se présenta - une rare élégance - avec dix minutes de retard à l'entretien. Profil bas. Étrangement.


L'entretien tint du tsunami. Dix sept griefs. Cachés depuis longtemps. Mais sortis du bois, comme autant de loups. En réponse au conseiller du salarié assistant Nadine, qui lui demandait si les "fautes" égrainées avaient été connues en temps réel par lui, il répondit que "Oui". Si elles avaient été abordées oralement avec la salariée? "Non". Formalisées par écrit? Sanctionnées? "Non".


Quand il entendit qu'il existait en la matière une prescription des fautes, l'employeur baissa la tête. Il eut la même inclinaison quand il lui fut fait part de l'étrangeté et de la soudaineté du licenciement entrepris, deux points qui frappaient l'entendement ordinaire. Il ne dit rien. Décidément, le moment était au silence lourd.


Licenciée quelques jours plus tard pour "faute grave" constitutive d'un départ sans indemnité ni préavis, Nadine indiqua à l'entreprise qu'elle désirait récupérer des effets personnels restés là-bas. L'entrée lui fut refusée. L'employeur ne voulait point la voir. "Faites une liste. On vous enverra tout par collissimo ! ". Pestiférée, Nadine.


Vous trouvez mon histoire un peu longue ? Moi aussi. Alors, passons directement au dénouement.
La vérité vraie sur la nature réelle du licenciement la voici, qui tient en deux dates:
* la lettre de licenciement était datée du 29 juillet.
* l'entreprise avait été mise en redressement judiciaire le 20 juillet...


Nadine reçut son dernier chèque par l'intermédiaire du mandataire judiciaire. Cherchez l'erreur dans la réalité des causes du licenciement. L'employeur devait lancer une procédure de licenciement économique. Il choisit le déshonneur, comme d'autres.


Nadine va retrouver du travail? Elle serait heureuse de n'être plus à la charge de la Société à cause de cet homme au regard fuyant qui l'avait placée là, sans scrupules et sans honte.


Quoi? Vous dites qu'elle est un peu grosse cette histoire ?
Elle est vraie pourtant. Du tout venant dans l'échelle de l'horreur ordinaire des ruptures du contrat de travail. Cela tient du syndrome des économies en temps de crise: sur le dos des salariés, à leur charge fautive et à celle de la collectivité quand en réalité pré-existent des difficultés économiques aux conséquences desquelles l'employeur veut se soustraire.


Vous voulez que j'en rajoute?
On me dit que l'employeur, ce gros menteur-tricheur qui n'aura pas hésité à malmener sa salariée serait même maire d'une commune de France !
Vous savez bien, le maire est cette personne élue par les citoyens pour qu'il exerce en leur nom ses talents de gestionnaire au service de la cité, et qui est ipso facto "officier d'état civil" dont il exerce les fonctions sous la responsabilité et le contrôle du Ministère de la Justice. Oui, de la justice...
"Pacifier le contrat de travail", qu'ils disent...


Qu'elle plaise ou pas, ceci est une histoire vraie, sauf le prénom de la salariée.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Si la société en question était en redressement judiciaire, l'employeur n'avait plus la possibilité de licencier qui que ce soit. C'était à l'administrateur de le faire, et je ne vois pas un administrateur nommer par le tribunal de commerce faire un faux.

Invoquer la faute grave pour éviter un licenciement économique me parait aussi bizarre. Si "Nadine" avait simplement pris rendez vous avec l'inspection du travail, elle aurait été soutenue de facto par son inspecteur qui aurait porté plainte aux Prudhommes ou menacé l'employeur de le faire.

Mais comme l'entreprise était en redressement, c'est impossible.

Le fait d'être en redressement n'empêche pas les licenciements, l'administrateur fait ce qui doit être fait pour régler les problèmes, mais surement pas en faisant un faux licenciement.

Ou alors "Nadine" a menti et a bien commis une faute grave, ce qui est possible, mais c'est à l'administrateur d'en juger, pas à son ancien employeur.

Un délégué du personnel

Raphaël JORNET a dit…

Raphaël JORNET a dit…
Cher "anonyme",

je publie très volontiers l'intégralité de votre commentaire, dont je vous remercie.
Certaines de vos remarques sont pertinentes, d'autres moins !
Relisez bien le billet: la salariée a subi cette procédure en ignorant que le redressement était en cours! L'employeur le lui a caché, tout simplement.

Quand elle est convoquée à l'entretien, elle ne sait pas que son employeur est entrain de connaitre une procédure de redressement judiciaire; lors de l'entretien non plus...

Quant à l'inspection du travail (demandez-le lui dans votre département), elle n'a pas la possibilité de "porter plainte aux prud'hommes" ni "menacer" un employeur !... cette suggestion ne peut être retenue,Et de plus, la salariée ne savait pas encore que l'employeur avait des difficultés économiques,... ne l'apprenant par un extrait Kbis qu'après réception de la lettre de licenciement !

Le mandataire judiciaire, lui, je suppose qu'il n'était pas au courant non plus, l'employeur s'étant tu encore une fois, pour éviter de licencier économique...

Mais rassurez-vius, l'affaire est bien devant le conseil de prud'hommes.

Voilà, Monsieur le délégué du personnel. Merci de votre intérêt.
Raphael

Anonyme a dit…

et comme je vois, à 22h30, que votre commentaire, anonyme, vient de Actuchomage page http://www2.actuchomage.org/forum/index.php?f=6&t=8352&rb_v=viewtopic ...

> je dis à "did":Au lieu de dire que « ça sent l’entourloupe », vous feriez mieux de savoir lire… et de ne pas être anonyme ! Vous avez peur de quoi ?

Oui, vous avez un problème avec cet article? : vous ne savez pas lire ! Vous émettez des doutes sur une mise au chômage ? étrange, venant de votre site !

et à "superuser", je dis que les « eclaircissements » qu’il abtenu de "did" sont ceux de quelqu’un qui ne sait pas lire…

Et aussi que oui, l’accès de mon blog est libre et transparent, « sans etre obligé de s’inscrire »… ! pas comme pour vous ! Mais moi, ça ne me fait pas peur de dire mon identité. Je vous aurais expliqué, vous savez !

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