dimanche 21 mars 2010

> Employabilité d’un auto entrepreneur en outplacement et psy-assistance



Ça me démange depuis un bout de temps. Mais, pour faire fructifier mon talent, j'ai décidé de me lancer dans l'auto entreprise. C'est une résolution nouvelle mais pas exempte de risques, dès lors que la concurrence y est redoutable. Cela dit, je peux toujours m'arranger pour ne rien gagner visiblement. Rude sera la concurrence.
Prenez les frites, par exemple. Dans ce secteur, trop tard chez nous, dans la  Région Centre : un secrétaire d'Etat, candidat sur une liste au Régionales vient de se faire livrer un camion aménagé flambant neuf (il vient de Corse) pour la vente ambulante des frites, exploitation intensive de l'homme par l'homme avec, comme vecteur, les patates. De ce que je sais, il irait se poster devant les lycées et les facs. Deux cornets Max achetés, et vous aurez droit à un cadeau. Un morceau de barre à mine datant de 1968, bien rouillé, avec des segments de nez. Pour ce marché là, c'est cuit.
Mais chacun peut prendre à son compte la formule nouvelle qu'est l'itinérance de « l'employabilité ». Tous les ministres candidats y seront amenés.
Voulant arrondir mes fins de mois (qui seront augmentées le 1er avril de 0,9%), j'ai décidé que je resterai dans la course en itinérant avec un bus à impériale, dont je ferai mon ordinaire.

Il sera mon domicile et mon bureau, mon usine à joies et mon  moulin à vent, et je suppute que nous irons loin.
J'avais dans un premier temps jeté mon dévolu sur un vieux bus à impériale anglais. Mais en le visitant, j'avais trouvé par terre un tract du PS  intitulé « tout est possible, tout dépend de vous ». La formule me plaisait bien pour le petit job que je voulais faire. Mais quand j'ai vu que le tract datait du « programme commun », je compris qu'il ne fallait pas acheter. C'était un mauvais signe.
 Je visitai deux autres bus, mais mon choix se fixa sur le FreightBus, le bus de l'avenir.

Il peut tout faire. Il peut non seulement être dédié à ce que je vais vous exposer, mais aussi assurer «non seulement au transport en commun de passagers mais également de véhicule de livraison en centre ville pour des marchandises livrées sur palettes.». Il peut accueillir  «90 personnes assises et 40 debout ou 52 assises et 98 debout.». J'ai été séduit par sa motorisation citoyenne mixte, au choix électrique ou mode hydrogène.
Ayant choisi le contenant, il fallait me fixer sur le contenant. J'ai trouvé ma spécialité ce matin.
Je vais m'en faire en or, dans le social, à cause de l'actualité. Vite fait bien fait, je vais te massacrer un DESS ou un DEA en psychologie, à la va comme j'te pousse. Titres convoités, qu'ils disent. Tu parles, je vois bien pourquoi !  Nécessaire et suffisant, pour moi, puisque « l'expérience en situation de travail » est déjà acquise. J'aurai même cet avantage : étant retraité et nouvel auto entrepreneur, je ne ferai d'ombre à personne, puisque c'est le sauve qui peut général maintenant, dans la France contemporaine.


Pour me rôder, et rôder mon bus, je ferai d'abord de l'outplacement.
Je l'appellerai le «bus de l'outplacement».

Je le laisserai rouge. Comme pour éteindre le feu.


Vous savez ce qu'est l'outplacement ?
L'outplacement est l'assistance extérieure offerte par une entreprise aux salariés dont le contrat de travail va être rompu. Autrement dit, c'est un "accompagnement personnalisé d'un candidat à la recherche d'une nouvelle activité professionnelle. C'est une mission menée dans les entreprises « ... où il est préférable de trouver une solution efficace au départ d'un cadre ou d'un non-cadre plutôt que des tensions persistantes, une "mise au placard" coûteuse ou une longue procédure prud'homale. Dans d'autres cas, cette solution intervient après absorption de l'entreprise par une autre, après réorganisation de l'entreprise et afin de se séparer d'un salarié qui voit son positionnement remis en cause.».
Vous voyez ce que je veux dire ? Mes futurs collègues disent aussi fort élégamment que «L'outplacement devient ainsi la solution élégante et non ingrate pour aider un salarié à se réinsérer professionnellement.». Ils sont d'un pudique !!
Je vais me faire du pognon sur le dos des licenciements, donc. Sauf le respect que je dois à mes futurs collègues. En toute confraternité.
Le marché est infini, vu que les licenciements explosent et qu'ils auront longtemps besoin de moi. Les salariés de mes conseils et de ma science, et l'employeur pour me payer.
J'irai d'abord tâter le pouls à Laurence Parisot, qui saura bien me dire si mon investissement de base est amortissable dans le temps.
Ma devise, je la vois d'ici : «je roule pour vous», ou «l'amorce d'une reprise" ou "l'amorce tranquille», écrit en blanc sur fond de petit village identitaire français, avec le bus rouge sur le côté. Je serai  "on the road again", on m'appellera "The king of the outplacement".


 Pour cela, il faudra que je jongle avec les symboles.
D'abord, pour faire sérieux, dans le bureau itinérant bien lumineux, il faudra punaiser des documents qui apaisent et donnent confiance.
 En premier lieu, des mains qui se touchent et s'empoignent.
Puis des images choc sur la vie actuelle de ces gens là, mes futurs clients, que l'on traite comme des pions, que l'on jette d'un seul geste du doigt ou qu'on écrase du pied.

Quand ils entreront dans le bureau ambulant, ils verront déjà de la lumière à travers le trou de la serrure, je serai là.

Je leur montrerai ce que je fais (en anglais, ça fait plus sérieux).


 Je leur dirai qu'ils ne sont pas personne, 
qu'ils ne sont pas qu'un rouage ou la pièce d'un puzzle
dans le dédale de la vie.
Qu'il faut savoir aussi se mettre à la place du patron, que «Cela permet de mesurer la complexité et les responsabilités que les chefs d'entreprise et leur famille doivent assumer sans relâche.»


Je leur dirai qu’on regardera à la loupe ce qu’il est possible d’imaginer.
On ciblera ce qui est concevable.

Je leur indiquerai des voies qu’ils croient impénétrables.
On passera au dessus des obstacles. 


 

Alors, le chemin de l’emploi sera pavé de frais gazon vert.

On aura en main l’arbre de vie
et alors, on commencera à penser positivement qu’il faut gravir les escaliers qui montent vers le bonheur
qu'on peut avancer sans crainte à l’ombre de nous même puisqu’on se sera bien vendu.
On arrivera au bout, en faisant nos comptes.


Sur le post-it, on écrira quand même de ne pas oublier de passer à Pôle Emploi.

Moi, à mes moments perdus, si je vois une jeune fille sur un banc à se lamenter sur son sort, j’irai la secourir, et nous avancerons vers notre destin.
La vie sera redevenue belle.
Après la crise, avec le plein emploi, on volera au dessus des eaux.
Avant ce bonheur là, après la révision des 50 000, je rejoindrai les 5000 psychologues du travail. 
Si je garde le bus, je me ferai appeler «formateur». Ça fera moins peur que «psy», appellation qui peut susciter la méfiance.
J’aurai ainsi gravi un échelon social dans le traitement de la crise.
Je veillerai à ne pas dire ce qui est et je dirai ce qui n’est pas. Alors, je deviendrai connu. Je ferai des conférences dans de grands hôtels parisiens.
Je prévoirai les risques et je gèrerai les risques psycho-sociaux. Je serai un maillon de la gestion des équilibres. Il y a un travail énorme là dedans : «1 personne sur 3 sera concernée par un trouble psychologique Les salariés étant des Hommes et des Femmes comme les autres, ils ne sont évidement pas exclus de cette statistique.»
Côté salariés, je ferai tout pour «soulager la souffrance psychologique au travail, assurer un « bien-être» et une productivité accrue…sur (le) lieu du travail,» ils peuvent être face à des situations stressantes, comme la concurrence entre individus, la course à la performance, la précarité». 
Je contribuerai à éviter «les passages à l’acte auto-agressifs
. Côté entreprise, je veillerai aussi au grain : l'entreprise, «parfois « coresponsable », souvent victime, … reste néanmoins toujours dépendante de la bonne santé de ses employés - élément essentiel à sa propre réussite».
Ainsi j’aurai amélioré «directement le «bien-être» moral des salarié et donc celui de l’entreprise», et «indirectement la productivité»  en encourageant «la performance de chacun, pour la réussite du groupe.» et contribué a la «réduction des coûts directs liés à cette problématique tout en dotant l’entreprise d’une image responsable, humaine, citoyenne».
Comme je suis très « social », j’accepterai les «tickets-psy», ces carnets de dix rendez-vous «entièrement remboursés par l’employeur», même s’ils sont perçus «comme un moyen utilisé par les entreprises pour se donner bonne conscience
.
Vous êtes de ceux qui disent qu’il faut se méfier de l’outplacement ?
Un peu de respect, s’il vous plaît






 

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