mardi 16 février 2010

> François, la banque, la Bourse ou la vie.



 
François était aussi attentif aux choses de la vie.
Ce matin, François s’était levé guilleret, avec ce pressentiment que la Bourse de Paris allait ouvrir en hausse.
Il avait raison. Une déception cependant: l’Oréal était dans le rouge, alors qu’il le valait bien. Par contre, hors CAC 40, gagnait «Bolloré 0,75% à 113,45 euros», sortant ainsi d’une baisse du chiffre d’affaire causée par la baisse du prix de l’essence, «…des échanges mondiaux» et du prix de la bitte d’amarrage de son yacht. Le Président Sarkozy aussi allait être content.
François était un optimiste.
Il s’était toujours dit qu’un jour, il lui faudra faire face aux évidences: il faudrait qu’il s’occupe de son argent.
Mais s’imposait toujours cette thématique lancinante: «Comment combiner performance absolue et gestion directionnelle dans le contexte actuel ? ».
La reprise, François la voyait bien venir.
Le 4 février, en revenant de l‘ANPE, François était allé assister à une conférence de presse de la société de gestion Edmond de Rothschild Investment Managers qui exposait son point de vue: «La reprise a l’air de s’amorcer et a des chances de se concrétiser particulièrement en raison de l’incroyable remontée des marges des entreprises pendant la crise. «En pleine crise économique, avec une contraction du PIB les entreprises ont su redresser spectaculairement leurs marges. Certes, cela a été au prix d’une remontée du chômage dramatique, de plans de relance colossaux qui ont permis de tenir plus ou moins artificiellement l’activité».
Dans le même temps Laurence Parisot du Medef racontait l’inverse, étalant ses peurs, ses histoires à dormir debout qui par ricochet faisaient peur à François, du genre «la baisse de cinq points du taux de marge dans l'industrie entre le troisième trimestre 2008 et le troisième trimestre 2009. A 17%, ce taux est le plus bas depuis 1982, a-t-elle ajouté, alors qu'il était de 24% en 2007.».
"Nous observons dans de nombreux secteurs des situations toujours très difficiles, très tendues", pleurnichait la dirigeante patronale française lors de sa conférence de presse mensuelle.
Sûrement les verres des lunettes de Madame Parisot ne sont-elles pas élaborées chez Essilor, dont la devise est «Mieux voir le monde». François se demanda comment lui faire savoir que les verres Crizal Forte éliminent «les 5 ennemis de la clarté de vision». Essilor se porte comme un charme, et Laurence Parisot n’empêchera jamais François de rêver.
François a toujours rêvé de détenir un compte chez Barclays et de faire gérer par Barclays Wealth Managers les actifs et son épargne salariale qu’il n’avait pas.
Il faut dire que Barclays Wealth, fait rêver, qui est «un des leaders mondiaux de la gestion de fortune» bien qu‘étant «une entité à taille humaine».
François connaissait un peu William Mussat le nouveau Directeur général de Barclays Wealth Managers France, puisqu’il avait eu, à un moment de faiblesse, une aventure avec la sœur d’un cousin de la femme de ménage du sous-directeur dans une soupente à Neuilly au dessus de la mairie, ou à Levallois-Perret, en face de Novagraaf.
Barclays ayant «… doublé son bénéfice en 2009» tout allait bien.D’autant que ses dirigeants étaient sérieux. Ils avaient reporté la distribution des bonus. Par avance, ils étaient d’accord avec le Président Sarkozy, qui a déclaré le 15 février aux «partenaires sociaux» que «Le temps est venu pour les entreprises d'aborder la question du partage du profit avec leurs salariés» … après que le patron de la banque, John Varley se soit opposé le 7 février au projet de réforme bancaire d’Obama… Ils n'étaient pas d'accord ou le faisaient exprès ?
François, parfois, ne savait pas à quel saint se vouer. Le CAC 40 non plus, d’ailleurs qui «sans soutien, ...a mollement rebondi». A ces nouvelles, comme la Bourse de Paris, François s’était «raffermi sans grande conviction». La mauvaise tenue de l’euro, sous pressions, inquiétait François. Il avait, comme d’autres, de «l’aversion pour le risque».
François rêve aussi parfois aux paradis fiscaux.
Mais depuis que «La France a désormais sa propre « liste noire» de pays encourageant l’évasion fiscale», François a un peu peur. Heureusement, «La liste des 18 États et territoires « non coopératifs » établie par la France n’épingle aucun de ses voisins à la fiscalité avantageuse tels la Suisse, Andorre, ou Monaco.».
Pourtant, ils ont du bon, non, les paradis fiscaux «normatifs» ? Ils «permettent de dynamiser un marché financier où les flux d'argent sont prisonniers des législations nationales.» …
Heureusement, François se félicitait de ne pas détenir d’or.
Il l’avait échappé belle. Assez de soucis comme ça, dans ce moment où on nous martèle que
"l’or baisse" … alors que "L'or a clôturé l'année 2009 à 753 euros. Le voici sept semaines après à 798 euros : +6% !", écrit Simone Wapler dans L'Investisseur Or & Matières. «- On nous raconte des salades» avait déjà dit Richard, un pote à François, qui sirote un peu trop mais qui a du bon sens entre deux Ricard: «Ce n’est pas le dollar qui rebondit, c’est l’euro qui décroche !»
François rêvait encore quand il se dit que le Président Sarkozy allait de bons choix pour nous: il allait «demander un effort de solidarité aux plus aisés, ce qui aurait permis de financer une hausse des dépenses sociales au profit de tous ceux pour qui la crise ne fait que commencer.»
Mais il se trompait, le François.
Le Président de tous les Français avait fait le choix inverse, celui de «réaffirmer son opposition de principe à toute augmentation des impôts, et lancer un grand emprunt dont on sait qu’il sera souscrit par les plus aisés, ceux qui épargnent de toutes façons une large partie de leurs revenus et qui cherchent aujourd’hui des placements sûrs. Nicolas Sarkozy s’inscrit ici dans la lignée des Pinay, des Giscard, en offrant une rente de plus à ceux qui ne manquent déjà de rien. ».
François, ce soir, ira chercher ses enfants de moins de 13 ans qui traînent toutes les nuits dehors, armés jusqu‘aux  dents pour faire peur aux petits vieux, avant  l’heure du couvre-feu adopté par l’Assemblée Nationale le 16 février.
Il passera devant la boîte à lettre sans l’ouvrir, car il sait que dedans, une lettre de sa banque (le Crédit Agricole et pas la Barclays) l’alerte encore sur le découvert bancaire que les 454 euros mensuels de chômeur en fin de droits ne permettent pas de résorber.
 

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